En savoir plus sur l'invention des verres progressifs

Sans entrer dans les détails, on peut dire que les premières années permirent de vérifier la faisabilité d’un tel verre, mais le confort obtenu, malgré l’exploration de plusieurs méthodes de génération, n’était pas suffisant. En fait, c’est l’invention de la méthode de génération « Point par Point » en 1956 qui me permit de modeler la surface et d’obtenir les caractéristiques optiques recherchées…

L’idée est simple : imaginez la surface théorique définie mathématiquement. Il suffit par la pensée de tracer sur cette surface un réseau de 4000 points distants entre eux d’un millimètre, et de calculer ensuite la distance de chacun de ces points au centre de courbure moyenne de la surface. Il ne restera plus ensuite qu’à usiner avec précision chacun de ces points avec une meule diamant de petit diamètre… Avec cette méthode, toute surface, si complexe soit-elle devient réalisable : il suffit de la calculer !

Je passerai sur les difficultés rencontrées pour définir mathématiquement, avec une très grande précision, ces nouvelles surfaces : aucune méthode de calcul n’existait. La méthode «Point par Point», si précieuse par sa souplesse entrainait des calculs d’une extrême longueur, et aucun ordinateur n’était accessible… Heureusement, vers 1958, j’ai pu gagner un temps précieux en utilisant les «cartes perforées», très récentes, du service comptabilité, après avoir adapté les programmes comptables à mon problème scientifique…

Dans les opérations matérielles qui devaient suivre ces calculs, tout était aussi à inventer :

Des machines à reproduire de grande précision, pour réaliser les verres à partir d’une matrice métal matérialisant les 4000 points calculés ; des machines à « doucir » et à « polir » les surfaces de verre ainsi obtenues ; des machines à graver des repères destinés au montage par l’opticien, etc.

Matrice métal de 4000 points

1953 : premiers essais

Incontestablement, la double formation que j’ai reçue (Mécanique + Optique), est à l’origine de Varilux… L’Optique m’a aidé à formuler la question, la Mécanique à y répondre… Sans cette double formation, il n’y aurait pas eu de Varilux, car je ne me serais même pas posé la question initiale.

Après de nombreux essais, la surface retenue fut « sphéro-progressive ». Il fallait en effet que, comme dans les double-foyers, la zone supérieure du verre, réservée à la vision de loin, soit dégagée de toute aberration.

Parallèlement à ces travaux, j’étudiais un progressif spécial destiné aux aphaques, qui, n’ayant plus d’accommodation, étaient très intéressés par cette nouvelle formule. Les petites dimensions de leurs verres me conduisirent à abandonner le type sphéro-progressif du Varilux initial, et à utiliser toute la surface disponible. Ainsi de nouveaux designs, furent calculés et réalisés. Les résultats furent très encourageants, mais ce marché prometteur disparu avec l’arrivée des implants…

Ces travaux sur des surfaces entièrement asphériques ne furent pas perdus, puisque conduisant à des surfaces plus douces, ils furent à l’origine de Varilux 2 présenté en 1972.

Bernard Maitenaz. Le 19 avril 2012.
Photos communiquées par B.Maitenaz, avec tous nos remerciements.

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