Krys Sète - Roustan
Charlène H
La thérapie génique est l’un des concepts les plus passionnants de la médecine moderne. Au cours de la précédente décennie, de grands espoirs ont été placés dans cette technique qui consiste à apporter des gènes thérapeutiques aux cellules « malades ». Dans le cadre d’une maladie causée par la déficience en une protéine essentielle, les médicaments conventionnels ne sont que de peu d’utilité. Le seul traitement envisageable est alors de pallier cette déficience via l’administration exogène de la protéine en transférant son gène. L’utilisation d’un gène comme médicament permet d’obtenir l’expression continue d’une protéine thérapeutique au sein des cellules cibles.
Les progrès de la recherche en génétique ont identifié un grand nombre de gènes responsables de pathologies rétiniennes, ouvrant de nombreuses opportunités pour le développement des thérapies géniques. La rétine est une tissu nerveux complexe qui tapisse le fond de l’œil, elle est essentielle pour la vision.
Le succès d’un traitement par thérapie génique dépend des systèmes de transfert de gène, plus communément appelés vecteurs. L’acheminement du gène vers les cellules cibles nécessite en effet l’utilisation de vecteurs qui doivent assurer une expression durable du gène et ce de manière spécifique (dans les cellules ciblées), sans engendrer de toxicité ni de réaction immunitaire de la part de l’hôte.
La conception de tels vecteurs, proposée pour la première fois dans les années 1970, s’est avérée plus compliquée que prévue et a été pendant de longues années l’étape limitante du succès de la thérapie génique.
Deux grandes catégories de vecteurs sont étudiées : les vecteurs synthétiques et les vecteurs viraux.
Les vecteurs actuellement les plus utilisés pour la thérapie génique in vivo sont les vecteurs viraux. Ces derniers profitent de la capacité naturelle des virus à incorporer leur matériel génétique (ADN ou ARN) au sein des cellules de l’hôte. Les rétrovirus, lentivirus, adénovirus et virus adéno-associés (Adeno-Associated Virus, AAV) sont les quatre types de virus principalement étudiés pour le transfert de gènes. Le virus adéno-associé est un virus non-pathogène et non-immunogène qui permet un transfert de gène efficace dans les cellules, in vivo.
Elle a connu ses premiers succès cliniques grâce aux AAVs. Un remplacement de gène par AAV chez des patients souffrant d’une maladie génétique rétinienne, l’Amaurose Congénitale de Leber (ACL) a démontré l’efficacité du vecteur sans effets indésirables. Cette preuve du concept a été rendue possible grâce aux propriétés favorables des AAVs en tant que vecteur, et de l’œil en tant qu’organe cible.
Suite à ce premier succès clinique la thérapie génique oculaire avance à grands pas pour étendre cette preuve de concept à d’autres maladies rétiniennes, tout en utilisant des virus comme vecteurs. Plus récemment des essais cliniques pour le traitement de la choroidérémie et la rétinopathie pigmentaire ont été initiés ainsi qu’un essai clinique sur la neuropathie optique de Leber, premier essai au monde dans les maladies mitochondriales. Des thérapies géniques employant un type de lentivirus sont aussi en cours actuellement à l’Hôpital des Quinze-Vingts pour le traitement de la maladie de Stargardt la principale dégénérescence maculaire du sujet jeune. En utilisant ce même type de vecteur un autre essai clinique est en cours dans le traitement du syndrome de Usher.
Cependant, il faut se rappeler qu’il existe un nombre très important de mutations responsables de dégénérescence rétinienne héréditaire, la Rétinite Pigmentaire étant la maladie génétique la plus hétérogène qui soit. Le problème de la diversité des gènes mutés, la diversité des mutations de ces gènes mais aussi des autres formes de la pathologie incitent à aborder une approche thérapeutique visant à cibler un mécanisme commun aux différentes formes de dégénérescences, en aval des mutations.
Par exemple, toutes ces atteintes partagent la même voie terminale : l’activation du programme de mort cellulaire qui conduit à la perte des photorécepteurs centraux : les cônes. Les photorécepteurs sont donc les cibles primaires des thérapies géniques pour combattre les dégénérescences rétiniennes. En utilisant AAV comme vecteur nous avons développé des stratégies innovantes visant à restaurer la sensibilité à la lumière dans les étapes avancées des maladies neurodégénératives. Dans ces maladies, la rétine a perdu les segments externes des photorécepteurs, cette partie qui les rend sensibles à la lumière. Dans ce contexte, une excellente solution est de rendre les corps de photorécepteurs subsistants sensibles à la lumière en les faisant exprimer des transporteurs activés par la lumière telle que l’halorhodopsine.
Cette stratégie innovante a déjà été testée chez des souris aveugles. Nous espérons pouvoir étendre le succès de cette stratégie à une utilisation chez l’homme dans les années à venir.
Auteur :
Deniz Dalkara, Chef d'Equipe, CR1 Inserm à l'Institut de la Vision* - Thérapies géniques et modèles animaux des maladies neurodégénératives.
Avec tous les remerciements du Guide de la Vue®.
*L'Institut de la Vision est le centre de recherche intégrée sur les maladies de la vision basé à Paris, il est labellisé « Laboratoire d’excellence » par le ministère de la recherche. Ce centre de recherche, l'un des plus importants d'Europe, est dirigé par le Professeur José-Alain Sahel.
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Découvrez l'article "La rétine artificielle progresse" par Serge Picaud, directeur de recherche Inserm-Institut de la Vision, Paris.
Crédit photo Deniz Dalkara : © Laurent Ardhuin pour l’UPMC
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Charlène H
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