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Marion V
Dans le domaine de la prise en charge de la déficience visuelle en France deux mondes coexistent :
Chez les adultes, la malvoyance reste un handicap méconnu, bénéficiant de peu de structures de prise en charge spécialisées.
Chez les enfants, la notion de nécessité d’un suivi spécialisé est historiquement beaucoup plus ancienne et structurellement mieux défini.
L’obligation scolaire s’imposant à tous jusqu’à 16 ans, les modalités de suivi et les structures de prise en charge pour les jeunes porteurs de handicap visuel existent sur pratiquement tout notre territoire. Cette situation est aux antipodes de celle concernant la prise en charge des patients adultes ou âgés, souvent beaucoup plus difficilement accessible.
Dés 1785 Valentin HAÜY fonde avec l’aide de la société philanthropique l’institution des enfants aveugles, première école au monde qui se donne pour but de dispenser gratuitement aux aveugles un enseignement collectif basé sur le principe de la suppléance sensorielle.
Plus tard la loi du 28 mars 1882 définit l’éducation des « enfants anormaux ».
Pendant la période 1914/1918, la première classe pour amblyope est créée.
Enfin en 1966, pour la première fois de jeunes élèves déficients visuels sont intégrés dans une classe de seconde à Nancy.
Le droit français consacre donc le droit à l’éducation pour chaque enfant, qu’il soit handicapé ou non.
La réforme du 11 février 2005 a renforcé cette notion en y adjoignant un droit à la scolarisation pour tous.
Selon l’expertise collective de l’INSERM de juin 2002, portant sur les déficits visuels de l’enfant, différents groupes de pathologies pourvoyeuses de déficiences sont identifiées.
Les atteintes des voies optiques :
Les atteintes des nerfs optiques, en particulier les atrophies des nerfs optiques, et celles des voies optiques supérieures, sont au premier plan.
Les atteintes rétiniennes :
Les pathologies de la rétine représentent de 21 à 40% des étiologies.
Les dystrophies rétiniennes se répartissent comme suit :
> 66% de rétinopathies pigmentaires
> 13% de syndromes d’USHER : association rétinopathie pigmentaire/surdité
> 10% de maladies de STARGADT : dégénérescence maculaire juvénile
> 5% d’amaurose de LEBER : dégénérescence de l’ensemble des photorécepteurs
> 3% de dystrophies de cônes
> 2% de cécité nocturne congénitale
> Autres atteintes rétiniennes : le rétinoblastome (tumeur maligne intra oculaire), et les décollements de rétine qui sont toujours redoutables en particulier dans les cas de fortes myopies et dans les dégénérescences vitréo rétiniennes.
Les malformations congénitales
Chez les nouveaux nés ce sont les malformations congénitales de l’œil qui sont au premier plan : microphtalmies, anophtalmies, aniridie, mégalo cornée, colobomes irido chorio rétiniens… Elles ont un taux de prévalence de 6 pour mille.
Les affections comme l’albinisme peuvent être pourvoyeuses de sévères déficits visuels en particulier dans les populations issues de l’immigration. 12 % des enfants suivis dans des centres de déficients visuels sont atteints d'albinisme. (Source : "Les causes de la déficience visuelle de l’enfant" publié par la société francophone d'orthopsie).
Séquelles de prématurité et de souffrances néo natales
Nous ne disposons pas de chiffres précis sur l’évolution des séquelles de prématurité et des encéphalopathies ischémiques. Cela concerne les nourrissons dont le poids de naissance est inférieur à 1500 grammes. De façon subjective, tous les services prenant en charge ces enfants constatent l’émergence de ces complications, exception faite pour la redoutable rétinopathie des prématurés qui est en nette régression grâce aux progrès de dépistage et de soins faits dans ce domaine.
Notons également la progression actuelle des déficiences de la fonction visuelle d’origine cérébrale, troubles neuro visuels en particulier.
Les affections congénitales à type de glaucomes et de cataractes, sont toujours présentes malgré les évolutions thérapeutiques récentes.
Quatre volets sont à explorer pour faire un bilan médico-social complet :
Nous insisterons sur le rôle central de l’ophtalmologiste pour orienter les parents, et sur l’implication de la législation entrée en vigueur début 2005 concernant la gestion du handicap (loi n°2005-102 du 11 février 2005, révisée le 12 juin 2010) pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées qui décline en 101 articles dispositif.
(Pour en savoir plus : www.legifrance.gouv.fr).
Dans un premier temps, c’est le pédiatre, le médecin départemental de la Protection Maternelle et Infantile, le médecin traitant de l’enfant qui effectue le dépistage précoce. Ce dépistage peut également avoir lieu dès la maternité ou dans les CAMSP. Les parents sont également très souvent à l’origine de la première consultation ophtalmologique.
Plus le diagnostic sera précoce, meilleure sera la prise en charge.
Le nourrisson doit être très rapidement dirigé vers l'ophtalmologiste qui effectue un bilan ophtalmologique associé à des examens complémentaires (échographie, électrophysiologie visuelle, examen sous anesthésie générale, …).
L’ophtalmologiste sera aidé par un bilan orthoptique basse vision, qui permettra « d’estimer » le degré éventuel de malvoyance, l’existence d’une amblyopie strabique surajoutée, de déterminer l’intérêt d'une prise en charge rééducative en libéral ou dans des structures spécialisées type SAFEP - SAAAIS.
Quatre questions fondamentales devront trouver réponse suite à ces bilans :
Est-ce une atteinte oculaire isolée ou associée ?
Est-ce une atteinte stable ou en évolution ?
L’enfant est-il malvoyant ?
Une correction optique est-elle nécessaire ?
Une cinquième question apparaît vers l’âge de 5 ans :
Existe-t-il un retard (psychomoteur, intellectuel,...) pouvant retentir sur ces acquisitions scolaires ? Ce retard est-il lié à la déficience visuelle ?
Une fois le diagnostic ophtalmologique établi, l’ophtalmologiste propose un traitement chirurgical, comme par exemple dans les cataractes congénitales, les glaucomes congénitaux. Certaines maladies orphelines comme la RPE65 (l’un des gènes de l’amaurose congénitale de Leber) peuvent bénéficier de traitement à base de thérapie génique.
Au moindre doute d’une polypathologie, l’ophtalmologiste doit également prescrire des bilans complémentaires comme un bilan neuropédiatrique et un bilan génétique.
C’est par le biais de ses conseils, de ses certificats et de ses prescriptions, que l'ophtalmologiste va aider et orienter les parents qui vivent souvent très douloureusement « l’annonce de la maladie et l’annonce du handicap ».
Les Maisons départementales des personnes handicapées, MDPH, constituent une sorte de guichet unique départemental pour toutes les questions relatives à l’accueil, l’information, l’évaluation et l’orientation des enfants handicapées.
Ces MDPH, à travers l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire, ont la charge de l’évaluation des besoins et des propositions et établiront un plan personnalisé de compensation sur la base d’un projet de vie.
La décision d’attribution reviendra à la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, CDAPH.
Elle accorde et fixe, à l'aide d’un guide barème www.ophtalmo.net, le taux d'incapacité permettant l'ouverture du droit à l’Allocation d’Education pour l’Enfant Handicapé, AEEH et éventuellement à un de ses compléments. L'AEEH est versée par la Caisse d'allocations familiales. Elle s'ajoute aux prestations familiales de droit commun pour compenser les dépenses liées au handicap de l'enfant, jusqu'à 20 ans.
La PCH, la Prestation de Compensation du Handicap, en place depuis 2006 vise à remplacer progressivement l'ACTP, l'Allocation Compensatrice pour Tierce Personne. C'est une aide financière versée par le conseil général. Le cumul AEEH et PCH est exclusif du complément d'AEEH. Les parents d'enfants handicapés doivent donc choisir entre le versement du complément d'AEEH et la PCH. Ce choix s'effectue sur la base des propositions figurant dans le plan personnalisé de compensation, PPC, élaboré par l'équipe de la maison départementale des personnes handicapées, MDPH.
Les CDAPH peuvent également examiner les demandes de carte d'invalidité, voire de carte européenne de stationnement pour personnes handicapées, qui sont délivrées par le préfet, sous certaines conditions.
La rééducation est un volet primordial dans l’acceptation du handicap et sa compensation. L’ophtalmologiste va pouvoir conseiller et orienter ces patients vers les acteurs de la rééducation.
Au sein des hôpitaux, des cliniques, de structures médico-sociales ou en libéral, les orthoptistes constituent une première démarche de rééducation.
Bien d’autres acteurs de la rééducation peuvent intervenir comme les psychomotriciens, les éducateurs spécialisés, les psychologues,... Les instructeurs en locomotion, les rééducateurs en activités de la vie journalière interviendront en général après 6 ans. Des ergothérapeutes et/ou des orthophonistes peuvent être amenés à accompagner des enfants déficients visuels, en effet ces derniers sont souvent confrontés à des troubles particuliers pour l'acquisition de la lecture et de l'écriture.
Concernant la rééducation pluridisciplinaire de la déficience visuelle des 0-3 ans, des organismes spécialisés existent. Il s’agit des CAMSP, des SAFEP et des SESSAD.
Le CAMSP, Centre d'Action Médico-Sociale Précoce, est un lieu de prévention, de dépistage et de prise en charge d'enfants de la naissance à 6 ans. Il a pour principale mission d'établir un dépistage et un diagnostic précoce, aussi précis que possible, des troubles du développement du jeune enfant. Une fois le diagnostic établi, ils assurent la rééducation de l'enfant et l'accompagnement parental, dans les locaux du CAMSP. Selon la nature du handicap, ils peuvent également orienter la famille vers d'autres services et équipes spécialisés compétents.
Les CAMSP disposent d'une équipe pluridisciplinaire associant diverses professions : pédiatre, pédopsychiatre, psychologue, psychomotricien, kinésithérapeute, orthophoniste, éducateur spécialisé et enseignant…et dans certains CAMSP orienté vers la déficience visuelle des orthoptistes. L'expérience confirme que l'intervention précoce d'un CAMSP a une influence très positive sur la qualité de l'intégration sociale future du jeune déficient visuel.
Il existe environ 300 CAMSP en France, implantés en général dans des grosses agglomérations. Pour une première consultation, il n'y a pas besoin de notifications de la CDAPH. Pour les parents, après notification de la CDAPH, l'accès aux soins du CAMSP est gratuit.
Le SAFEP : Service d'Accompagnement Familial et d'Éducation Précoce est une sous catégorie de SESSAD, Service d'Éducation Spécialisée et de Soins à Domicile, spécialisée dans la prise en charge des enfants déficients sensoriels de 0 à 3 ans.
Le SAFEP a pour objet d’intervenir auprès des enfants de la naissance à l'école maternelle dans le cadre de l’éducation précoce, et auprès des parents pour l’accompagnement familial. Il a pour rôle de conseiller, informer et soutenir les familles avec un jeune enfant présentant une déficience visuelle ou une cécité. Il aide également l'enfant à développer son autonomie dans son quotidien en interaction avec sa famille. Enfin, il prépare et soutient les enfants à l'entrée progressive dans la vie sociale : crèche, garde par assistante maternelle, entrée à l'école…
La souplesse et la mobilité de ces structures leur permettent d'assurer un accompagnement à la fois éducatif, pédagogique et thérapeutique, articulé au sein du projet individualisé de chaque enfant quels que soient son âge et le niveau de son handicap.
On peut également envisager un mode de garde individuel avec une assistante maternelle ou collectif en crèche ou halte garderie. L'accueil de l’enfant au sein d’une structure petite enfance peut lui être bénéfique. Depuis le décret d'août 2000, l'accueil des enfants handicapés est spécifié comme une mission des structures d'accueil petite enfance. Certaines structures « pouponnières à caractère sanitaire » ont fait de l'accueil des enfants handicapés un projet spécifique comme La maison des poupies à Nantes. Il existe également des crèches spécialisées, complémentaires des SAFEP, pour très jeune enfant déficient visuel au sein d’institution pour déficient visuel comme à Vertou (Institut Pour Handicapés Visuels 44) ou à Toulouse (Centre Lestrade 31).
Quelles aides ?
Un nourrisson de moins de 3 ans atteint d’une déficience visuelle peut et doit être aidé et stimulé par le biais d’aides techniques ou par un aménagement spécifique de sa chambre.
Ainsi des livres reliefs, des jeux, des meubles adaptés peuvent favoriser l’éveil et le développement du bébé.
Des fournisseurs sur Internet, de nombreux magasins vendent ce type de matériel. Citons notamment Hop’Toys, Eveil et jeux, Nenko France, IKEA, Benjamins média, et de nombreux éditeurs de livre éducatifs sonores. Enfin de nombreuses associations et des bibliothèques prêtent des ouvrages, des livres reliefs*, des jeux ou des documents sonores.
* Exemple de livre relief, tactile, pouvant être associé au sonore et au braille : "Gontrand le goret " Edition Benjamin Média.
Photo ci-contre : livre relief et gros caractères aux Editions Benjamin Média.
Les implications de la loi de février 2005 :
la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées déterminera les besoins.
le financement des aides techniques pour les enfants est pris en charge soit par le complément de l’AEEH soit par la PCH.
des budgets pour des aides techniques au sein de l’école existent aussi au niveau du ministère de l’éducation nationale : Handiscol.
Pour avoir un éclairage sur quelques possibilités d'aides visuelles, vous pouvez consulter notre dossier " Les aides visuelles ". Les professionnels qui suivent l'enfant sont les meilleurs conseillers.
Les bilans ophtalmologiques doivent se caler sur les grandes étapes de la vie sociale, de la scolarité et de l’entrée dans le monde professionnel :
Pour les moins de 3 ans, on visera à rechercher des pathologies associées et à inciter les parents à la socialisation de leur enfant
Pour les 3 à 6 ans, il faut préparer l’entrée au CP et rechercher un retard psychomoteur, voire un trouble des apprentissages ( les fameux "dys…" ), ou bien un retard intellectuel
Pour les 11 ans, il faut essayer d’obtenir une stabilité de la pathologie pour le collège
Pour les 14 ans, se pose le problème des déplacements, et du cyclomoteur avec le Brevet de Sécurité Routière
Ensuite se pose l’orientation professionnelle : les ophtalmologistes peuvent demander l’avis des services de pathologie professionnelle au sein des CHU.
Après la pose du diagnostic ophtalmologique précis et la délivrance des soins thérapeutiques indispensables, la question de la nécessité d’un suivi en compensation de handicap par une structure spécialisée se pose.
Ce n’est pas la pathologie elle-même qui nécessite une prise en charge spécialisée mais ses conséquences fonctionnelles, qui elles sont source de déficience. Un suivi s’impose donc, dès qu’il y a risque de déficience et ce quelle que soit la pathologie causale.
Il n’existe pas de limite d’âge pour prendre en charge les enfants. Les tous petits peuvent bénéficier d’un suivi si celui-ci est souhaité et bien compris par les parents. Les grands adolescents sont eux parfois plus difficile à toucher mais ils sont souvent demandeurs d’aide.
Deux types de structures se côtoient et se complètent : les structures médico-sociales et les dispositifs d’aide à la scolarité.
Lire la suite sur la prise en charge d'un enfant malvoyant
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Quelle est la différence entre un ophtalmologue (ou ophtalmologiste) et un orthoptiste ? L’orthoptiste est un professionnel de santé qui assure des actes de rééducation et de réadaptation de la fonction visuelle, qui participe à des actions de dépistage des troubles visuels, et pratique des examens complémentaires nécessaires à l’exploration de la vision.
Les moyens thérapeutiques Les lunettes de vue enfants représentent le premier moyen pour donner une bonne vision aux deux yeux. Il existe des montures adaptées aux bébés et jeunes enfants.
Chez l’enfant, la déficience visuelle pose des problèmes différents de celle de l’adulte. Selon sa gravité, elle peut affecter à des degrés divers le développement psychomoteur et les possibilités d’apprentissages.
Marion V
Elisabeth G
Anne-Laure P
Aurélie C