La lunetterie : histoire d'une métamorphose
Sur la même thématique :
Une belle histoire qui commence au Moyen Âge
L’invention des lunettes se situe au Moyen Âge mais il est difficile de la dater précisément. De même, l'inventeur n'est pas clairement identifié.
Et pourtant, les problèmes de vision évoqués par Aristote dans son livre Problemata, et le pouvoir réfractif de certaines pierres transparentes, étaient connus bien avant.
Besicles en cuir, 16ème siècle
©musée de la lunette, Morez-France, coll. Essilor - Pierre Marly/photo. Studio Vision
Dès l’Antiquité, des verres sont polis pour faire converger les rayons du soleil en un point qui génère de la chaleur et brûle la zone visée.
Il est communément admis que les premières lunettes apparurent au 13ème siècle, certains ouvrages situent cette invention en Italie.
Les premières lunettes ne ressemblent pas du tout à celles que nous portons aujourd’hui. Il s’agit de deux verres (convexes) ronds enchâssés dans des cercles attachés individuellement à des manchons reliés entre eux à l’aide d’un clou, ce sont les besicles clouantes.
Les verres concaves n’apparaissent qu’au 15ème siècle.
Bois, corne, écaille de tortue et ruban...
Contrairement à beaucoup de produits, cette invention ne bénéficie pas d’un essor immédiat. Ces besicles réalisées en bois, en corne ou en cuir et ne corrigeant que la vision de près, sont surtout utilisées par les moines copistes.
C’est vraisemblablement l’invention de l’imprimerie qui démocratisa le port des besicles, elles évoluèrent en remplaçant le clou par un pont, ce sont les besicles à pont arrondi.
Les besicles fabriquées avec des matériaux nobles comme le bois, l’écaille de tortue, l’os, l’ivoire sont alors un signe d’érudition, elles sont réservées à la bourgeoisie.
Lunettes en corne et en cuir avec lanières pour les oreilles, Japon 18ème siècle
Copyright : Fondazione Museo dell'Occhiale Onlus
Les lunettes connaissent tout de même une évolution. Elles seront munies d’un ruban noué derrière le crâne puis en 1752 un opticien anglais invente et brevète les branches telles que nous les connaissons aujourd’hui, ce sont les lunettes à tempes. Elles doivent cette appellation au fait que les branches sont très courtes et s'arrêtent au niveau des tempes. Cette particularité est dûe au port des fameuses perruques du 18ème.
Les lunettes sans branches restent néanmoins à la mode dans la bourgeoisie avec les monocles au 16ème siècle, les binocles au 18ème siècle et les faces à main au 19ème siècle, tous richement ornés.
Lunettes royales :
Lunettes à tempes, 18ème siècle, attribuées à Louise Victoire, fille de Louis XV
" L’extrémité des branches de cette lunette livre deux indices trahissant l’identité de sa propriétaire : une fleur de lys et des initiales « V.L. ». Cette lunette tout en argent a en effet appartenu à un membre de la famille royale de France : Marie-Louise-Thérèse-Victoire de France [1733 – 1799], encore appelée Madame Victoire, fille de Louis XV et de Marie Leszczyńska. "
©musée de la lunette, Morez-France, coll. Essilor - Pierre Marly/photo. Studio Bernardot
18ème et 19ème : orfèvres, monocles, binocles et faces à main
Tout au long du 18ème siècle, les lunettes à tempes sont taillées dans le métal par les orfèvres et les forgerons ou sculptées par des artisans dans des polymères naturels tels que la corne ou l’écaille de tortue. Elles sont fabriquées une à une à la main.
L’amélioration des matériaux utilisés pour fabriquer les lunettes mais aussi l’industrialisation ont contribué à l’essor des lunettes au 19ème siècle. Elles sont devenues plus confortables, plus légères, plus ergonomiques, plus excentriques aussi.
Le saviez-vous ?
Savez-vous que le berceau de la lunetterie française se situe dans une petite ville du Jura ?
C’est à Morez qu’à partir du 16ème siècle, moulins, roues, martinets et autres machines à transformer le métal seront mis en mouvement. Des ateliers des bords de Bienne vont sortir des clous, des horloges, puis au début du 19ème siècle des lunettes métalliques. Sera créée également la première Ecole pratique d’industrie au lycée Victor Bérard.
Crédit photo : ville de Morez
Binocles, Fin 18ème – début 19ème siècle
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly/Studio Vision
Lunettes à tempes en écaille de tortue, Modèle anglais,18ème – 19ème siècle
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly/photo. Studio Bernardot
Pince-nez, 19ème siècle,
Production Morézienne
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly / Studio Vision
Face-à-main,19ème siècle
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly/photo. Studio Bernardot
Lunettes en or avec nez déporté
et verres bifocaux de type Benjamin Franklin
Copyright : Moss Lipow collection
Lunette-fil ou lunette-cheveu, Métal tressé, Production Morézienne, fin 19ème siècle
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly/Studio Vision
Monocle féminin, 19ème siècle
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly/Studio Vision
Face-à-main long manche,
Belle époque, écaille de tortue
©musée de la lunette, Morez-France,
coll. Essilor - Pierre Marly/Studio Vision
Le Guide de la Vue remercie :
- le musée de la Lunette de Morez-Jura -France : www.musee-lunette.fr
- Monsieur Moss Lipow et les éditions TASCHEN
Retrouvez plus de 1 000 lunettes, plus extravagantes les unes que les autres, qui couvrent près de 500 ans d’histoire et de design dans l’ouvrage de Moss Lipow EYEWEAR aux éditions TASCHEN.
Le créateur de lunettes Moss Lipow a écumé eBay, les salles des ventes, les vide-greniers et les marchés aux puces du monde entier pour constituer sa collection de binocles, de lunettes rares et de photographies. Ce livre, qui retrace l’histoire de la lunetterie au cours du dernier millénaire, présente les plus intéressants articles de cette collection, ainsi que des modèles appartenant à d’autres amateurs de cet accessoire.