Krys Sète - Roustan
Charlène H
La rééducation ou réadaptation orthoptique « basse vision » est un entraînement visuel, entendu au sens de l’éducation visuelle déficiente qui permet d’optimiser les capacités visuelles avec ou sans aide optique sans améliorer la vision.
Elle permet de :
limiter les incapacités pour préserver la meilleure autonomie possible et favoriser la qualité de vie dans le vécu du handicap, prévenir des risques inhérents à la malvoyance, diminuer la dépendance de la personne âgée
favoriser la compréhension de l’entourage : une déficience visuelle qui ne se conçoit pas, qui ne se voit pas mais pourtant il voit toujours mal : la vision peut-être déformée, décolorée, partielle, décalée, parcellaire fluctuante, déboussolante, intolérable…
Actuellement, les orthoptistes sont « seuls habilités à effectuer les actes de rééducation de la vision fonctionnelle chez les personnes atteintes de déficience visuelle d’origine organique ou fonctionnelle. » ART3.2/7/01.
Toutefois, certains ne dispensent pas ce type de prise en charge (choix personnels, implantations…).
Si les troubles de la vision binoculaire, les strabismes et les amblyopies sont pris en charge par les orthoptistes depuis plusieurs dizaines d’années, il faut attendre 1988 pour que « l’entraînement visuel du patient malvoyant» soit inscrit dans le décret de compétences des orthoptistes (1988, 2001,). L’entraînement visuel du patient malvoyant s’inscrit dans l’évolution de la prise en considération de la personne handicapée et de la malvoyance distinguée de la cécité à l’instigation du Docteur DELTHIL dès 1930. De longue date, l’éducation d’une fonction déficiente à visée compensatrice ou adaptative est admise avec le concept de rééducation :
entraînement moteur spécifique au patient déficient moteur en kinésithérapie
entraînement verbal, auditif, gestuel au patient sourd ou malentendant en orthophonie.
Pourtant, proposer « un entraînement visuel » à un patient malvoyant, est resté longtemps inconcevable et le reste encore pour certains, notamment quand il s’agit de personnes âgées.
Dans la même logique, les textes définissant les structures médico-sociales chargées de l’éducation des enfants déficients sensoriels auditifs et visuels avaient prévu l’entraînement SENSORIEL et le personnel compétent pour le faire: Orthophonistes chez les sourds, Orthoptistes chez les amblyopes bilatéraux.
Les orthoptistes ont ainsi été poussés à rechercher les stimulations de la dynamique oculaire indispensables à l’utilisation des aides optiques et les sollicitations nécessaires à l’élaboration de stratégies de suppléance qui permettrait de compenser et de s’adapter au mieux aux activités de la vie avec sa déficience visuelle.
Les travaux de SEDAN, THOMAS, BANGERTER, CUPPERS dans l’amblyopie strabique les y ont aidés.
C’est donc, à l’origine, la proposition d’un entraînement visuel à des enfants contraints de se construire avec une déficience visuelle définitive, qui a permis de mettre en place l’entraînement réadaptatif de l’adulte et de la personne âgée.
La prise en charge orthoptique « basse vision » est proposée aux patients porteurs de maladies de la fonction visuelle entraînant un syndrome de malvoyance.
Elle est adaptée
au degré de malvoyance qui selon l’intensité de la déficience, peut être modéré, sévère
au patient : ses besoins, ses capacités physiques, son âge, son cadre de vie, ses motivations
à l’évolutivité de la pathologie qui peut motiver un ajustement de la prise en charge
à la forme clinique dont 3 formes sont classiquement distinguées
les patients avec atteinte de la vision centrale ( centre du champ de vision) dont la forme classique est la DMLA. La rééducation porte essentiellement sur la vision fonctionnelle: Il s’agit de faire prendre conscience du service rendu par la vision périphérique, d’apprendre à voir autrement en utilisant une zone de rétine restée saine (fixation de suppléance), de maîtriser les conditions optimales de perception (éclairage, contrastes, éblouissement) et de favoriser l’utilisation et l’appropriation des aides optiques
les patients avec atteinte de la vision périphérique avec l’exemple classique de la rétinite pigmentaire. La rééducation porte sur les stratégies oculomotrices et oculocéphaliques de balayage et d’exploration de l’environnement.
les patients avec atteinte mixte c'est-à-dire vision centrale et périphérique, avec comme exemple les glaucomes graves, où la rééducation doit prendre en compte plusieurs facteurs et nécessite l’apprentissage de toutes les stratégies adaptées.
Illustration du champ visuel avec la vision binoculaire (des 2 yeux ensemble), la vision centrale et la vision périphérique.
©Guide-Vue.fr Ne peut être reproduit.
Sont concernés aussi les patients présentant un trouble des milieux (fortes amétropies, cataractes congénitales…) et ceux présentant des mouvements oculaires anormaux (nystagmus).
La prise en charge orthoptique est adaptée au malvoyant :
chez l’enfant, il s’agit de l’aider à se construire avec une déficience visuelle définitive et parfois évolutive. Il est nécessaire de rappeler que 80% des informations reçues du monde extérieur ont une entrée visuelle
chez l’adulte et la personne âgée, il est nécessaire de prendre en compte qu’il s’agit d’une déficience visuelle acquise et souvent évolutive qui s’ajoute aux conséquences du vieillissement et des poly-pathologies qui l’accompagnent.
Le syndrome de malvoyance majore les risques inhérents à l’âge que sont les chutes, les dépressions, les démences, les troubles mnésiques. La finalité est :
de permettre à la fonction visuelle d’assumer autant que possible son rôle de support pour la communication, la saisie de l’information, l’organisation du geste, l’équilibre et les déplacements
d’atténuer le handicap visuel
de sauvegarder l’autonomie
de préserver l’emploi
de favoriser le maintien au domicile
de participer à la prévention des maladies ou des troubles susceptibles d’entraîner des désordres d’autres fonctions : troubles de la marche, de l’équilibre, état dépressif, état confusionnel.
Il s’agit d’une prise en charge qui se déroule en 2 temps :
des séances de rééducation orthoptique « basse vision ».
Cette réadaptation s’adresse à des patients ayant un potentiel visuel susceptible d’être évalué ou optimisé.
A l’issue du bilan, un projet réaliste est élaboré avec le patient en fonction de sa pathologie, de ses besoins, de sa disponibilité, de sa fatigabilité. L’adhésion de la personne malvoyante est indispensable.
Lors des séances de rééducation, par des exercices appropriés, expliqués, commentés à toutes distances et dans différents plans, avec et sans aides-optiques, ils permettent au patient :
de mieux comprendre sa déficience et ses conséquences
de mieux utiliser son potentiel visuel, par compensation fonctionnelle
de prendre conscience de ses limites
d’élaborer des stratégies
de favoriser l’adaptation et l’utilisation aux aides optiques
de permettre à l’entourage de prendre conscience du handicap visuel.
La présence de l’aidant naturel (conjoint, enfant, auxiliaire de vie) est souvent souhaitable. Elle permet à l’entourage de mieux comprendre les difficultés consécutives au déficit visuel.
La prise en charge orthoptique en « basse vision » comprend le bilan évaluatif et les bilans de contrôle.
Le bilan « évaluatif » : son protocole est déterminé selon le déficit.
Il s’agit :
Il favorise l’orientation du patient vers une prise en charge appropriée :
Le bilan évaluatif aide le patient à mieux comprendre son déficit, ses capacités visuelles et leurs limites, le retentissement de cette affection sur son quotidien. Il débouche ou non sur un projet de rééducation orthoptique «basse vision». Il favorise l’information du patient sur les aides et les structures existantes : aides optiques, livres en caractères agrandis, bibliothèques sonores, associations, autres rééducateurs. Il peut s’inscrire dans le cadre d’une action de prévention et d’éducation thérapeutique. Il constitue une base de données sur les conditions d’accessibilité visuelle de chacun, indispensable à tous les acteurs de la prise en charge de la personne âgée malvoyante.
Les bilans de contrôle sont indispensables pour s’assurer du maintien des acquis, mais aussi en cas d’évolution de la pathologie. Ils favorisent une orientation plus adaptée en cas d’aggravation de la malvoyance.
L’orthoptiste a un rôle essentiel dans l’appropriation des aides optiques, l’apprentissage des techniques d’utilisation est un temps fort de la rééducation orthoptique « basse vision ». Pour permettre une bonne adaptation aux aides optiques, l'orthoptiste :
Mais avant d’aborder les aides optiques, l’orthoptiste veille à ce que la personne déficiente visuelle soit prête à accepter de se servir d’un outil particulièrement « contraignant ».
Ce qui suppose de s’être assuré :
L’orthoptiste doit également prendre en compte le niveau de stabilité de l’affection sans laisser pour autant la personne malvoyante dépourvue si le besoin en aide optique est formulé, mais il faudra alors se montrer très pondéré dans les choix possibles.
Il faut admettre que l’utilisation des aides optiques engendre des efforts permanents, une grande énergie, une fatigue certaine et un apprentissage se révèle indispensable.
A l’issue de ce travail, l’orthoptiste se doit de s’assurer de l’utilisation de l’aide optique dans la vie quotidienne de la personne et d’apporter les précisions et les ajustements utiles à une bonne intégration. Si la transposition ne paraît pas évidente, des séances complémentaires pourront alors être envisagées.
Favoriser la bonne utilisation des aides optiques, c’est pour l'orthoptiste :
Assurer son rôle « conseil », c’est :
L’orthoptiste apprend aux patients à utiliser les meilleures stratégies visuelles possibles avec l’équipement.
Il travaille en collaboration étroite avec les différents intervenants de la prise en charge globale de la personne déficiente visuelle : l’instructeur de locomotion, le rééducateur en activité de la vie journalière, le formateur en informatique adaptée pour les cas sévères et l’opticien spécialisé, « technicien de l’optique », pour trouver le ou les équipements les mieux adaptés (adaptés aux patients mais également à l’utilisation qu’il veut en faire).
Le choix en aides optiques est vaste mais, chacun de ces systèmes a ses propres limites et génère des contraintes d’utilisation à faire comprendre et à respecter :
L’orthoptiste lors de sa prise en charge peut non seulement aider le patient à trouver l’aide la plus adaptée à ses besoins et à son degré de malvoyance mais s’efforce d’en favoriser une bonne utilisation par des exercices adaptés pour une bonne appropriation espérant ainsi favoriser la transposition dans son quotidien.
Certains auteurs, notamment les publications de MALTHIEU et coll.*et de COHEN ET Coll* ont montré que la satisfaction des usagers étaient nettement plus élevée chez les patients ayant bénéficié d’une rééducation orthoptique par rapport à ceux qui n’avaient pas été rééduqués.
Comme toute réadaptation, la rééducation orthoptique basse vision a ses limites et son objectif doit être clairement exprimé : il ne s’agit pas d’améliorer la vue mais de mieux utiliser les possibilités visuelles, c’est apprendre à voir autrement.
Malheureusement certaines personnes ne bénéficient pas d’une prise en charge orthoptique
D’autres ne sont pas prêtes à s’investir ou sont résignées
La nomenclature actuelle des actes orthoptiques concernant la personne malvoyante s’appuie sur la classification internationale de l’OMS et habilite les orthoptistes à prendre en charge les patients des catégories I à IV : " acuité visuelle corrigée comprise en 3/10e et 1/50e et/ou un champ visuel inférieur à 20° ".
Les actes sont définis comme étant des actes orthoptiques « basse vision ».
La classification de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) classe les déficiences visuelles selon l'acuité visuelle et le champ visuel. Cinq catégories de déficiences visuelles sont définies et numérotées de I à V :
les catégories I et II correspondent à la malvoyance
les catégories III, IV et V correspondent à la cécité.
Classement OMS des déficiences visuelles
CLD = Compte Les Doigts
Le bilan orthoptique est remboursé par les caisses d’assurance maladie dès lors que l’orthoptiste est conventionné et que le bilan a été prescrit par un médecin.
Les séances de rééducation sont soumises à entente préalable et remboursées également par les caisses d’assurance maladie.
Les bilans orthoptiques « basse vision » durent une heure.
Les séances de rééducation « basse vision » durent 40 minutes avant l’âge de 18 ans révolus et durent une heure chez l’adulte.
Le nombre de séances est variable selon le degré d’atteinte.
La rééducation peut être dispensée au cabinet de l’orthoptiste, à l’hôpital ou dans des centres de réadaptation ou sur le lieu de vie de la personne si la prescription le précise.
Durant cette prise en charge, l'orthoptiste reste en relation avec tous les acteurs concernés : médecins, opticien, rééducateurs.
Un compte-rendu est adressé au prescripteur à l’issue du bilan et à chaque fois que cela s’avère nécessaire et à l’issue du traitement.
L’orthoptiste est un des principaux acteurs de la prise en charge rééducative de la personne malvoyante qui ne peut s’inscrire que dans une prise en charge pluridisciplinaire. Par ses conseils, il aide la personne à mieux s’adapter à l’environnement.
L’orthoptiste libéral, «réponse de proximité», par sa disponibilité, ses soins (domicile, cabinet) permet une prise en charge rapide, accessible à moindre coût, remboursée par l’assurance maladie et les mutuelles complémentaires.
Orthoptiste et patient ne devront jamais oublier que la prise en charge orthoptique n’amènera pas la guérison, ne permettra pas la récupération d’une fonction visuelle « normale » mais elle permettra l’adaptation à une fonction visuelle déficiente.
Les informations fournies sur le site Guide-Vue.fr sont destinées à améliorer, non à remplacer, la relation directe entre le patient (ou visiteur du site) et les professionnels de santé. Cet article a été rédigé par Le comité éditorial et mis à jour le 29/10/2024.
Quelle est la différence entre un ophtalmologue (ou ophtalmologiste) et un orthoptiste ? L’orthoptiste est un professionnel de santé qui assure des actes de rééducation et de réadaptation de la fonction visuelle, qui participe à des actions de dépistage des troubles visuels, et pratique des examens complémentaires nécessaires à l’exploration de la vision.
Il y a quelques années la notion de malvoyance était mal connue. Les personnes déclarées en cécité légale, définie par un seuil de performance visuelle ouvrant droit à une prise en charge orthoptique, étaient considérées comme non voyantes.
L’ophtalmologiste, appelé aussi ophtalmologue, autrefois "oculiste", est le médecin spécialiste des yeux et de la vision. Selon le Larousse médical, l’ophtalmologie est une discipline médicochirurgicale et optique qui se consacre à l'étude de la structure et du fonctionnement du système visuel, ainsi qu'aux maladies qui le concernent.
Charlène H
Virginie R.
Marion V
Elisabeth G